Buveurs de vent

L’écriture singulière de Franck Bouysse nous offre une histoire noire et lumineuse à la fois. Une sorte de conte moderne qu’il serait plaisant de transmettre à ses enfants pour les aider à faire leurs choix et avancer sans jamais se satisfaire.

C’est le deuxième livre que je lis de cet auteur ; après avoir adoré « Né d’aucune femme », j’ai retrouvé avec grand plaisir l’écriture particulièrement soignée de l’auteur : des descriptions métaphoriques et poétiques qu’il sait si bien mettre au service d’une atmosphère glauque, poisseuse, au service de certains personnages plus abjects les uns que les autres, dans une lente montée vers cette acmé dramatique, tout cela sur fond de complicité fraternelle… j’ai vraiment aimé, peut-être un peu moins que le précédent mais j’aime définitivement la « patte » de Monsieur Bouysse…🙂

Après le succès du livre précédent "né d'aucune femme" on se demande toujours à la sortie du nouveau livre s'il sera à la hauteur. Buveurs de vent est vraiment une réussite. On retrouve certains ingrédients avec un milieu de vie rude, des familles marquées par la vie, le travail, l'absence de communication. On retrouve aussi et surtout une belle écriture, à la fois simple et riche. L'histoire est aussi prenante avec ces vies enclavées dans une vallée à la merci d'un homme contrôlant la centrale électrique, seule source de travail. Les relations sont dures, parfois primaires mais il y a toujours la poésie d'une nature souveraine qui les entoure.

C’est le combat entre l’ombre et la lumière. Combat de l’ouvrier et le patron un peu comme ds les livres d’Emile Zola. Deux mondes, la nature et la centrale. Bonne lecture

C’est avec ce roman de la rentrée littéraire de cette année que je découvre enfin Franck Bouysse. S’il est indéniable qu’il a un style littéraire absolument magnifique, je dois avouer avoir refermé ce livre avec un avis en demi-teinte. Le Gour Noir est une vallée hors du temps, coupée du reste du monde. Terre recluse, qui ne répond qu’à ses propres lois. À celles de Joyce, plus précisément, tyran énigmatique qui asservit chaque habitant de cette étrange contrée. Parmi tous ces habitants, il y a quatre frères et sœurs : Marc – qui doit se cacher pour lire. Mathieu – en symbiose avec la nature. Mabel – effrontée, rebelle et qui ne rêve que d’indépendance. Et enfin, Luc – « l’idiot », comme le surnomme sa mère. À eux quatre, chacun à leur façon, ils vont remettre en cause les fondements même du Gour Noir. Cité perdue dans laquelle les hommes travaillent dans les entrailles de la centrale hydroélectrique et où les plus belles femmes sont sous le joug du proxénétisme mis en place par Joyce. Les mots de Franck Bouysse sont magnétiques, vibrants. Sa capacité à écrire la ruralité, les paysages sauvages, les relations humaines… c’est très beau, très poétique. Malheureusement, je n’ai pas réussi à totalement m’immerger dans l’histoire. Au lieu de plonger au Gour Noir avec Marc, Mathieu, Mabel et Luc, je suis restée sur le viaduc, observant tout de haut. Et de très loin. Sans aucune réelle émotion. La fin m’a laissée sur ma faim. Trop peu crédible, qui arrive tel un cheveu sur la soupe. Pourtant, le premier tiers du roman m’avait vraiment séduite. J’espère que « Né d’aucune femme » me procurera amplement plus d’émotions que ce récit, qui avait malgré tout beaucoup pour me plaire.