Récitatif

La quintessence du génie littéraire de Toni Morrison est dans ces quelques pages, suivies d'une éclairante postface de Zadie Smith. Comment mettre le lecteur en position inconfortable, face à ses jugements et ses contradictions, sans jamais céder à la facilité ? Une démonstration de ce qu'est la littérature.

L’unique nouvelle écrite par l’autrice américaine vous mettra dans une position très inconfortable (c’est pas moi qui le dit, au cas où vous croiriez que j’ai viré ma cuti, c’est Zadie Smith dans la postface). Toni Morrison raconte en effet l’histoire de deux petites filles, puis femmes, qui sont très vite identifiées comme de races différentes (la notion de race n’étant pas ici génétique mais sociologique, au cas où vous croiriez de nouveau que j’ai viré côté obscur) mais sans vous dire qui est qui. C’est évidemment tout le jeu de la lecture que de confronter vos propres stéréotypes et vos constructions mentales avec le contenu du récit. Qui est plus susceptible d’être ultra-religieuse? Qui porte des pantalons moulants? Qui aime les saucisses-purée et qui le poulet? Un exercice hautement intéressant, bien sûr et très intelligemment décortiqué par Zadie Smith dans la deuxième partie de l’ouvrage. Ma collègue le fait lire à ses lycéens et je m’en réjouis. Ça promet des têtes bien faites!

Ce livre est une démonstration, un tour de force de Tony Morrison. Elle nous écrit une nouvelle sur la vie entrecroisée de deux jeunes filles qui deviennent femmes. Elles se croisent à divers moments de leur vie. Le coup de force réside dans le fait qu'on ne sait pas qu'elle fille (puis femme) est noire et l'autre blanche. Ce n'est jamais dit dans le livre. Seul notre vécu nous fait faire un choix. Et dans ces quelques pages ce n'est pas le seul message, je ne vous en dit pas plus. Quel claque. Que dire de la postface, une explication de texte qui nous permet d'aller au-delà de notre propre perception. J'aurais adoré avoir un des livres comme ça accompagné d'un explication de texte comme ça au lycée... Merci à Zadie Smith. Un pur plaisir de lecture et de réflexion.

Que dire de plus que les avis précédents sur cette œuvre de Toni Morrisson, si ce n'est de réitérer son talent ? Les quelques pages de cette unique nouvelle de l'écrivaine maintient le doute et entretient notre souhait (dont nous ne sommes que très peu maîtres) de labelliser Twyla et Roberta de leur étiquette raciale blanche et noire. Très très fort. L'indispensable postface par Zadie Smith fait encore plus briller cette œuvre.

les deux commentaires précédents. Éclairage très instructif en deuxième partie de livre.