Les versets sataniques

Voilà, c'est le moment de relire ce livre. La chute initiale, depuis un avion explosé en vol, est clairement le symbole d'une naissance, d'un accouchement, la formule débutant le conte (le "Il était une fois", où bien "Il était et il n'était pas") n'arrivant qu'à la page 58. Un conte des mille et une nuits, donc, à moins qu'on ne soit dans un film de Bollywood, on ne sait pas trop au début  : une oeuvre d'imagination débridée, ça c'est certain, une écriture baroque semée de symboles et de thèmes variés, sous le signe de la liberté ; liberté du conteur aérien de narrer au gré des vents avec un humour constant, liberté du lecteur de lire ou de ne pas lire ce qu'il veut. Allez, un court extrait, pour réfléchir : "Selon une certaine façon de voir les choses, l'homme qui a pour but de créer s'approprie le rôle du Créateur : c'est un anormal, un blasphémateur, l'abomination des abominations. D'un autre point de vue, on peut imaginer en lui du pathos, de l'héroïsme dans sa lutte, dans sa volonté de prendre des risques : tous les mutants ne survivent pas." La seule condition, pour goûter ici à cette liberté créatrice, c'est de savoir lire. Et savoir lire, c'est savoir vivre.

Je voulais m’attaquer à ce monument, mais le style érudit et complexe m’a découragé et je n’ai pas réussi à aller au bout. Les auteurs de la fatwa sur M. Rushdie n’y avait peut-être rien compris non plus…

Lecture ardue. Son style est riche, voir complexe. Ses références sont en dehors des miennes, ce qui peut expliquer cette difficulté à rentrer dans l’histoire. Histoire tout à fait dans l’air du temps.

…style ardu mais étonnement facile à lire. Contrairement à certains romans trop longs, celui-ci se lit par grands coups de 50 pages (ou 250 d’un coup pendant un trajet en train…). L’histoire métaphorique se plait à perdre le lecteur. J’ai sincèrement adoré. Il est rare de trouver un livre si récent et de si bonne qualité.

Salman Rushdie: je vous en veux un peu de perdre votre lecteur dans vos premières lignes… De fait; les trente premières pages j’avançais sans comprendre un traître mot de ce que je lisais. C’était douloureux! Mais la suite en vaut la peine car Rushdie est un si bon conteur, et certains passages sont d’une intense beauté et d’une grande philosophie. Si vous avez une grande culture s’agissant de l’islam (et des religions de façon plus générale), du Royaume-Uni et de l’Inde : vous pouvez débuter votre lecture en toute tranquillité. Sinon: accrochez-vous, on finit par saisir l’essence de ce livre. Je reste persuadée que plus vous avez de connaissance en la matière, plus vous apprécierez votre lecture.