Ivo a mis les voiles

Puisqu'il est perdu n'en parlons plus. Et pourtant. On se laisse volontiers aller à refaire l'histoire, à se dire qu'on aurait du faire autre chose pendant ce temps. Profiter, discuter, écouter. Certains sont même prêts, pour la refaire, à la remonter en entamant un périple qui pourrait la modifier. Oui mais voila, ce qui est derrière nous est inaccessible et toute tentative est vaine pour le rattraper.... mais pas pour l'apprivoiser. Dans "Ivo à mis les voiles", on accède à deux courses symétriques dans des dimensions parallèles. Ivo, malade, qui cherche à rejoindre le lieu de son rêve pour s'éteindre et Pedro qui veut refaire le chemin pour comprendre. Tous deux ne sont liés que par les histoires de vies, sans qu'on ne sache bien ce qui les unit vraiment. Le temps qui s'écoule est présent partout, dans les rencontres éphémères qu'il "est l'heure" de quitter, dans les trajets qui semblent interminables, dans les discussions qui expliquent et qui filent sans qu'on ne les comprennent vraiment. Personne ne se pose, même si dans le fond ils se laissent porter. C'est une jolie morale que nous livre Nicolaï Pinheiro, puisque l'histoire ne s'arrête jamais et que seuls les gens disparaissent, écrivons la notre, calmement. Il accompagne ses mots de dessins apaisés, dans les visages, où il est rare de distinguer autre chose, dans les couleurs et les scènes de vies. Tout respire le calme de ces secondes qui s'effacent mais qui reste gravées en nous. C'est vrai qu'on aurait surement préféré que certaines choses arrivent plus tôt, qu'il est facile de se rappeler les occasions perdues et qu'imaginer des chemins différents peut parfois rendre acceptable le présent. Mais puisqu'il n'y a plus de temps à perdre alors prenons notre temps. Car c'est ainsi que s'inscrit ce qui nous permet de voir devant, sereinement.