Faim

Les premières pages ont suscité chez moi une certaine forme de malaise. Je suivais un personnage qui m'était peu sympathique jusqu'à ce qu'il soit littéralement dévoré par la faim, englouti et digéré à son tours par cette ville où les autres ne sont qu'un regard. Il y avait quelque chose à comprendre que je n'ai néanmoins pas encore compris cependant: dans le délire du personnage, difficile de discerner ce qui est réel de ce qui ne l'est pas, jusqu'à la fin sur ce quai, jusqu'à cette fille que j'ai cru pendant de longues pages être la mort. Les dialogues eux-mêmes sont murés dans une subjectivité parfois agonisante puisqu'on n'entend la parole des autres que digérée préalablement par le protagoniste. Et puis ce sort qui semble parfois être l'œuvre d'un autosabotage, d'un homme qui cherche contradictoirement la faim et l'inspiration, la mort et le large. 1850... Je me dis que l'influence de Hamsun est à peine croyable, gênante aussi, lui qui offrit son prix Nobel a Goebbels... On la retrouve dans l'Étranger, mais aussi chez Sartre et Gide. Je crois que j'ai adoré au final, j'ai épousé cette vie intérieure, sa honte qui devient paradoxalement une forme de méchanceté, celle du désespoir...