Grandville. Force majeure : une romance scientifique de l'inspecteur détective LeBrock de Scotland Yard

Tout planifier. Anticiper les grains de sable. Prévoir les réactions. Imaginer ce qui pourrait découler. Choisir entre les solutions. Se résigner à ce qu'aucune ne soit idéale. Si pour certains, c'est une façon de gérer l'angoisse des changements, pour d'autres, c'est inconscient et ça construit un carcan d'immobilisme. Il y a forcément un juste milieu entre la planification et le lâcher-prise nécessaire. Dans ce dernier tome de Grandville, LeBrock aura tout échafaudé. Sentant la tenaille se resserrer autour de sa gorge et de ceux qui lui sont chers, il nous entraîne dans une comédie noire où il sera autant chasseur que chassé. Elle lui permettra de se venger d'un passé violent et de nettoyer les menaces qui pèsent. On retrouve avec plaisir les principaux personnages de la série. C'est toujours aussi dynamique dans la narration et dans le rythme effréné. Violent et abrupt. Entre les flashbacks de son passé en tant qu'apprenti inspecteur et l'intrigue de ce "Tour de force", on apprend encore un peu plus sur ce personnage qui n'est pas sans rappeler Maigret : taciturne, méthodique et bourru. Même si la fin ne fait pas trop de doute et que les rebondissements ne sont pas très étonnants, Bryan Talbot nous livre un ultime opus haletant et bien ficelé. Alors oui, c'est un peu chiant de toujours tout anticiper. Être minutieux est sûrement une bonne méthode pour enquêter, mais lorsqu'il s'agit de vivre, mieux vaut se laisser aller parfois. Les choses s'imbriquent d'elles-mêmes dès que l'élan de la direction est franc et joyeux.