L'homme de Kiev

Yakov Bok vient s’installer à Kiev pour une vie meilleure. Sa femme ne lui a pas donné d’enfant et l’a quitté pour un autre. Yakov est réparateur, de tout, et il est même capable de gérer une entreprise. Tout allait si bien jusqu’à ce qu’un enfant de 12 ans soit retrouvé mort d’une quarantaine de coups de couteau 🔪. Il a rien fait Yakov, à part être juif. Rien ne l’accuse... Sauf les autorités russes en pleine période antisémite. Yakov va alors vivre l’enfer carcéral. Je regardais ce bouquin sur ma pile de livres à lire et sa couverture me semblait peu engageante... Mais aucun regret ! Le style de l’auteur est incroyable, on rentre dans cette triste histoire sans avoir l’envie d’arrêter. 4 jours et 427 pages plus tard, je ne peux que conseiller de lire ce livre tant le sujet semble malheureusement toujours d’actualité. Et vous, vous l’avez lu ?

Dans la première partie du livre, on suit les difficultés quotidiennes du héros, qui aspire à mener une vie lui offrant les mêmes opportunités qu’à n’importe qui, ce qui ne semble pas être une mince affaire pour une jeune juif dans l’empire tsariste au début du XXe siècle. La description de l’antisémitisme à l’œuvre est glaçante. La majeure partie du roman décrit le calvaire du héros qui attend son jugement en cellule, entre solitude complète et humiliations. La description des effets de l’isolement et de l’absence de perspectives sur la psychologie et l’état général du héros est particulièrement développée. L’écriture et la construction font ressentir au lecteur la dimension interminable de l’attente... Autant vous dire qu’on ne referme pas le livre avec beaucoup d’espoir

1911. Yakov Bok fraîchement arrivé de son village natal s’installe à Kiev, bien décidé à y trouver une vie meilleure. Yakov est réparateur. De ses doigts, il répare tout. Et là, à Kiev, c’est sa vie qu’il veut réparer après le départ de son épouse, partie pour un autre... Yakov est Juif. Loin d’être anodin dans cette Kiev du début du XXeme siècle qui a connu d’ignobles pogroms et qui garde des quartiers entiers interdits aux Juifs. Alors, quand un jour dans l’un de ces quartiers, un enfant est découvert assassiné, Yakov, le Juif, est le coupable tout trouvé. Lui, qui taisant son identité, y a travaillé... Tout agnostique est-il, le voilà accusé d’avoir tué ce petit gars pour on ne sait quel rituel juif fantasmé par les chrétiens. La vie de Yakov bascule. Les geôles russes, la torture, le froid et l’humidité, la faim, la peur deviennent son quotidien. Tout l’accuse. Toutes ses vérités deviennent des preuves aux yeux de ceux qui veulent le voir coupable. Il doit avouer. Mais comment avouer ce que l’on n’a pas commis ? Kafkaïen. Yakov lutte au prix d’atroces souffrances, mais il lutte contre ses bourreaux. Il lutte pour sa vérité. Ce livre est grand, très grand car il oblige chacun d’entre nous à regarder en face cette haine, cette inhumanité, cette violence dans lesquelles l’Homme bascule si facilement et si régulièrement dans l’Histoire. Il nous faut tous lutter impérativement, absolument pour que la solidarité, l’humanité, le respect gagnent.