Chien 51

Ce livre me laisse un sentiment de malaise même s’il m’a plu. Ça semble parfois tellement réel et proche qu’il suffirait d’un claquement de doigts pour que cela prenne forme. Il invite également à réfléchir sur ce que nous voulons ou pas pour notre futur.

Je ne savais que Gaude tapait dans le registre dystopique. J’ai trouvé tous les ingrédients de l’univers cyberpunk : un monde ravagé par plusieurs crises, un pouvoir détenu par une poignée de consortiums, un héros-flic défoncé aux psychotropes mais… tellement attachant ! Les chapitres sont courts, ça donne du rythme. Une bonne intrigue. J’aurai aimé quelques pages de plus ( ou peut-être une suite) pour connaître le destin de l’amie perdue du héros. Bref, je recommande.

Mon premier Laurent Gaudé. Très belle écriture de l’auteur, chapitres courts et fluides. On ne lâché pas le livre. Enquête dans une Grèce devenue un pays acheté par une multinationale et qui est divisée en trois zones. Le héros habitant la zone des démunis et de la misère va enquêter dans les zones des protégés et des riches. Il va enquêter avec une flic femme qui habite l’une de ces zones. Le duo marche parfaitement et l’ensemble des personnages, bons comme méchants, sont superbement bien décrits. Mention spéciale au duo qui est très attachant. L’auteur n’en fait pas trop, il n’y a pas de caricatures, il n’épargne pas ses héros, bref j’ai adoré et suis triste d’avoir terminé le roman. Le côté science fiction ne doit pas vous rebuter car c’est assez léger et ce qui est décrit pourrait arriver. Moi qui n’aime pas la science fiction, j’ai été, ici, conquis. Les lieux m’ont fait penser un peu au film Blade Runner, avec un soupçon de Total Recall. A lire d’urgence.

La Grèce n'existe plus. L'état a fait faillite et le pays –comme d'autres- a été racheté par une multinationale tentaculaire, GoldTex. Les habitants sont passés de citoyens à cilariés mais la grande majorité a disparue, éliminée impitoyablement. Les survivants sont regroupés à Magnapole une mégalopole connectée divisée en trois zones gardées par des checks-points : la classe dirigeante en zone 1, la classe moyenne en zone 2 et pour le reste, les déclassés, c'est la zone 3, une banlieue suburbaine déshéritée, exposée aux pires intempéries, pluies acides, rayonnement solaire mortifère et cyclones (furies) aussi imprévisibles que désastreux. C'est là que vit Zem Sparak : avant il habitait Athènes et avait participé activement à l'insurrection qui s'était opposée à GoldTex… Maintenant il est flic et opère dans les quartiers populeux et miséreux. Un matin il est appelé sur une scène de crime : un homme retrouvé éventré sur un terrain vague. Ce qui pourrait n'être qu'un énième meurtre ordinaire de la zone 3 s'avère plus complexe lorsqu'on découvre qu'il s'agissait d'un cilarié de la zone 2. Zem est sommé de faire équipe avec une policière de la zone 2, Salia Malberg : il sera son « chien », un bon toutou chargé de creuser, chercher, fouiller et rapporter. Ce qu'ils vont découvrir dépassera de très loin le simple crime crapuleux … Je suis épatée par l'épaisseur et la profondeur de ce roman d'anticipation ultra noir (dont l'ambiance m'a fait penser parfois à Blade Runner ou à Soleil Vert). En moins de 300 pages (210 pour la version numérique) l'auteur (Prix Goncourt, tout de même) parvient à bâtir une dystopie très sombre mais très crédible, centrée sur un personnage complexe à la psychologie fouillée –Zem Sparak- touchant à des thèmes sociétaux et politiques qui résonnent fort dans notre actualité. L'avenir vu par Laurent Gaudé fait peur, vraiment. Et pourtant, en y regardant d'un peu plus près, on y est presque…

Autre roman, autre style. Laurent Gaudé ne cesse pas de me surprendre. Après la lecture de « La mort du roi Tsongor » qui a été le roman qui m’a fait découvrir cet auteur, je suis passée par « Le soleil des Scorta » et maintenant « Chien 51 ». Dans ce livre, Gaudé écrit une dystopie, un futur assez proche qui est l’aboutissement des dérives de notre monde actuel : une prise d’importance de grandes entreprises qui rachètent des États en faillite telle la Grèce, une ségrégation sociale très forte, les conséquences du changement climatiques, les loteries comme ascenseurs sociaux, des jeux de pouvoir entre les mouvements politiques, … Notre voyage dans ce monde futuriste s’effectue par le biais d’une enquête policière liée à un meurtre réunissant deux personnages de deux zones sociales différentes, un policier de la zone 3, ce fameux chien qui doit obéir à son supérieur issu de la zone 2. Cependant, l’affaire tire des ficelles bien plus profondes qu’il n’y paraît. Bien que le genre soit désormais assez connu et les grandes lignes souvent repérées, L. Gaudé arrive encore à nous surprendre avec certaines questions/ points assez pertinents. Notre Orwell français nous guide à travers des réflexions terrifiantes, qui laisse de glace une fois le bouquin achevé. Fini la poésie du roi Tsongor, mais le style reste toujours autant plaisant à lire. J’ai trouvé l’intrigue prenante, les personnages attachants et surtout le personnage de Zem, le fameux « chien ». Un titre symbolique, d’ailleurs, je vous laisse dès à présent savourer la lecture du roman afin d’en comprendre le sens.