Discrétion

L'attention est surtout dans l'invisible. Dans tout ce qui ne se voit pas. En connaissant l'autre. En devinant ce qui peut convenir. Ce qui est souhaité. Pas besoin de montagnes ostensibles. Ni que ce soit remarqué. Cela s'inscrit dans le mouvement de ce qui est fait. Un silence adapté, un oreiller qui trouve sa place au bon moment, un livre attendu, une commande passée sans demander, un trajet sans autre prétention… La liste peut être longue de tous ces petits gestes qui n'attendent pas de réponse, pas de merci, pas de regard. Stanislas est petit lui aussi. Invisible à tout ce qui dépasse son mètre 57. C'est un peu embêtant quand ce sont les longues jambes féminines qui le font chavirer… dès lors qu'elles sont chaussées avec goût. Il travaille dans le magasin de sa passion. Stiletto, bottine, lamballe, mule, nu-pied et autres escarpins enchantent ses journées. Mais sous son fétichisme se cache une grande tendresse. Il sait tout de suite ce qui convient, en fonction du style et du physique de la personne. Il est tellement troublé par ses émotions qu'on le cache au fond du stock. De là, il va s'efforcer à déployer son attention, sans que personne ne le remarque. L'histoire aurait pu en rester là, et on aurait pu sourire à la légèreté des traits et des textes de Zanzim. Mais non, on est dans une ode à l'altruisme discret. En devenant minuscule, il va entrer dans l'intimité des gens. Si sa position s'apparente un peu à du voyeurisme, il n'en est rien, et sa manière de scruter l'autre n'est qu'une façon d'interroger le besoin. C'est beau et poétique. Le combat final contre le crabe maladif au sein de celle qu'il aime est touchant et émouvant. Certains peuvent hurler qu'ils font ou feraient preuve d'attention, d'autres en demander toujours plus, mais la beauté réside dans la discrétion, car il n'y a pas de contrepartie attendue. Ou alors elle est dans le sourire que cela déclenche et dans la sérénité qu'elle procure à nos relations. "Grand petit homme", à lire sous une couverture, sans être vu.