La vie est ailleurs

Le titre de ce roman fait allusion à une célèbre phrase de Rimbaud : “La vraie vie est absente”, aussi, il n’est pas surprenant qu’il ait pour thème la poésie et l’art de façon plus générale. Mais il n’y a pas que ça : Il s’agit également de la genèse de Jaromil, l’un des personnages fétiches de Milan Kundera. “La vie est ailleurs” est un texte qui parle de l’adolescence dans ses tourments et ses merveilles, de l’amour, charnel, maternel, poétique… De l’enfance à l’âge adulte, le poète Jaromil est balancé dans sa quête de l’affect, de la sexualité et de la reconnaissance ; il les cherchera dans sa famille, chez les femmes et ses mentors, puis jusque dans ses propres fantasmes et dans la révolution communiste qui gronde à Prague. En parallèle, on suit aussi le parcours de sa mère, tour à tour femme, épouse, amante, veuve… C’est un ouvrage déroutant et riche qui se partage entre le cruel et le poétique, jusqu’à une frontière de plus en plus mince qui finit par complètement s’estomper.

« Vous pensez que le passé, parce qu’il a déjà été, est achevé et immuable? Ah non, son vêtement est fait d’un taffetas changeant et chaque fois que nous nous retournons sur lui nous le voyons sous d’autres couleurs » Kundera plus subversif que jamais. Nous entraînant avec lui dans un point de vue perverti, faisant naître en nous une compassion qui nous pousse à tolérer voir même accepter le vice, avant de démonter ce qu’il nous a lui même poussé à apprécier et adhérer en nous propulsant dans un autre point de vue. L’histoire d’un poète qui pense être un génie mais qui semble finalement médiocre ... mais n’est ce pas la poésie dans sa globalité qui est attaquée dans ce roman de Kundera ?

Une immersion dans le milieu artistique tchèque, de précieuses réflexions sur l art dans un milieu politique révolutionnaire, mais aussi le poids d une mère sur l éducation d un fils.

Bien moins touchant que L'Insoutenable légèreté de l'être, les personnages m'étaient très antipathiques ; cruels, égoïstes, lâches et sans une once de remise en question. Heureusement, Kundera est toujours aussi bon scénariste, donc j'ai quand même bien aimé. À mes yeux, concernant les personnages, c'est les carnets du sous sols mais sans l'esprit critique et les vannes. Donc bon, il faut être patient.

Lu il y a longtemps, avant mes débuts en psychiatrie. Perturbant initialement, et si notre vie se passait pendant notre sommeil ? Maintenant je pense à la psychose.