W ou le souvenir d'enfance

Un roman difficile. Il est singulier de par sa forme. L’alternance des chapitres entre la cité imaginaire W et les souvenirs d’enfance rend souvent la lecture complexe. La description de W nous fait rentrer progressivement dans le monde de l’absurde, absurde qui se déploie au fur et à mesure que se révèle le système hiérarchique de cette ville imaginaire, le but des entraînements intensifs, de la sélection des "élites", des châtiments. Très vite l’image de cette ville où tout semblait idyllique en début de lecture se transpose avec l’horreur des camps. L’anéantissement des faibles, l’abrutissement des forts n’ont qu’un seul et même objectif la destruction de l’être humain, sa déshumanisation. Les souvenirs d’enfance sont là pour faire le lien entre W et la période de la guerre et de l’occupation. Le côté énigmatique s’estompe pour laisser place à une prise de conscience. C’est un roman étrange, mais au combien nécessaire.

La construction du livre est très intéressante, elle amène tranquillement à réfléchir, à jongler, parfois même à intervertir les deux récits. Le tout se lié de manière très fluide, doucement, sans s'en apercevoir on comprend la métaphore se demeler. J'ai adoré ce livre, l'ai lu au moins 3 fois, la première classique, en respectant le chapitrage, la seconde en lisant d'abord toute la partiebio, puis tout W. Ça donne une lecture bien différente... À lire absolument !

W est un des livres les plus vertigineux qui m’a été donné de lire ! Perec joue habillement entre fiction métaphorique et autobiographie déguisée dans le but de lutter contre l’oubli qui l’a tourmenté toute sa vie.

Avec une habilité remarquable, Pérec nous entraîne dans les pas d'un enfant disparu -son alter ego- avant de brouiller les pistes et voguer vers l'utopie de W

Pour moi, une entrée dans le vrai de Perec, sa sensibilité, sa fragilité et sa formidable résilience : l'écriture de soi salvatrice.