Comment jouir de la lecture ?

Pourquoi prendre plaisir à lire quand on peut en jouir ? Clémentine Beauvais décortique les différents plaisirs de lire, bien loin de l’élitisme reac (seule la littérarité prime) et du discours plaisir (peu importe le texte pourvu qu’il y ait l’ivresse). Elle démontre que la jouissance de lire est politique et que priment nos questionnements, la prise de recul, la recherche même de l’origine du plaisir. Tout ce qu’on n’a jamais appris s’agissant de littérature. Un court texte tout à fait salutaire qui permettra d’aborder la lecture différemment.

L'autrice explique dans ce petit essai notre construction autour de nos goûts de lecture en exposant les deux schémas typiques qu'on peut retrouver : "le discours réac" et la "lecture plaisir". Elle nous invite à nous interroger sur ce que provoquent nos lectures personnelles, à définir nos différents types de plaisir, à en parler autour de nous et à sortir de notre zone de confort. Ce texte m'a vraiment fait réaliser plusieurs choses quant à mon regard sur la lecture. Il montre aussi que tout est politique et construit, que nos goûts littéraires évoluent en fonction de nombreux critères sociaux et sociétaux.

Je n'avais jamais lu Clémentine Beauvais et ça a été intéressant de la découvrir dans ce court essai. Je dois avouer que je n'ai pas été fan de l'introduction orientée sexe (même si je pouvais m'y attendre au vu du titre) qui n'est pas assez tenue dans la suite pour être cohérent (à mes yeux). Cependant, le matériel de réflexion est intéressant. Ce livre cherche à nous apprendre à aimer la lecture, à comprendre et enrichir notre ressenti et découvrir ce qu'on l'on aime, ce que la lecture et les mots suscitent en nous, se concentrer sur ce qu'on ressent par rapport au texte et pas seulement analyser le texte (Clémentine Beauvais y critique l'intellectualisation de la lecture et de l'hégémonie culturelle tirée des élites). Les goûts et le plaisir que l'on en retire sont politiques (et l'industrie livresque et ses modes ne sont pas liées au hasard). Il est important de prendre du recul, de déconstruire ses idées, de se questionner et de prendre en compte ce qu'implique le plaisir prit dans nos lectures. On en ressort avec l'envie de découvrir de nouvelles choses, des genres qui peuvent nous rebuter, grâce aux autres. Je garde mon idée toute faite concernant la traduction ~ On ne m'enlèvera pas la certitude qu'une bonne traduction ne devrait pas se ressentir pas à la lecture.

Cet essai m'a particulièrement parlé car il raisonne tout à fait avec ce que j'ai choisi de faire depuis le début de cette année 2024, d'où la création du compte gleeph. Lire plus, lire mieux, lire différemment et parler de mes lectures, livre par livre, expérience de lecture par expérience de lecture, ect ect L'affaire s'est révélée bien plus compliquée que ce que je pensais, mes avis n'allant rarement plus loin que ''très sympa'', ''instructif'' ne sachant plus très bien pourquoi j'aimais bien ce que je lisais. Me demandant si, finalement, on en avait quelque chose à faire de tout ça. Et bien oui ! Se questionner, s'apprendre, changer sa façon de voir le monde au travers de sa lecture et savoir en parler, mettre des mots dessus : ça m'importe car ça me fait plaisir !

Un court essai qui interroge notre rapport à la lecture et donne des pistes pour aller plus loin, pour s'interroger, apprendre à se construire SON identité de lecteur·ice et sortir des deux discours majoritaires que l'on croise sur la lecture : le discours réac (les BONS livres et les autres) et celui de la lecture-plaisir (souvent sérialisation, au service de l'industrie éditoriale – et puis finalement, qu'est-ce que le plaisir ?). À mettre entre toutes les mains !