Aucun souvenir assez solide

Ces nouvelles sont sans aucun problème les textes de fiction les plus complexes que j'ai lus au cours des dernières années. Le degré de profondeur, de lucidité et de pertinence semble augmenter à chaque ligne du recueil, mais au prix d'un véritable effort qui vise rien moins qu'à comprendre ce dont on parle. L'auteur use d'absolument tous les outils linguistiques pour nous emporter dans des mondes en apparence inconcevables, en réalité souvent à notre porte. La grammaire est retournée comme un tiroir, le style creusé à coups de hache, le vocabulaire secoué comme un prunier : lire ces histoires n'est pas simple, tout simplement. À chacun de se faire sa propre idée là-dessus, mais rares sont les lectures aussi actives à prodiguer autant de plaisir. Le niveau de maîtrise sous nos yeux est juste hallucinant, je n'ose pas imaginer la masse de travail nécessaire ne serait-ce que pour la forme. Et je ne préfère pas songer au talent évident pour la marier si bien avec le fond. Hymne vibrant au langage, hommage au lien qui unit chaque élément, critique sans manichéisme des réseaux qui déraisonnent, éloge du mouvement... Le tout allié à un sens de la narration qu'il est difficile de ne pas applaudir... Pour moi, indépendamment de toute considération intellectuelle, le jeu littéraire en vaut largement la chandelle.

Je me suis arrêtée après la nouvelle des Hybres. Je n'ai aimé que deux nouvelles et le reste... Ça m'a plus embrouillé le cerveau qu'autre chose. Encore une fois je cherchais la magie de " La Horde" mais c'est un deuxième échec. J'ai encore un livre de Damasio et je vais y aller à reculons... C'est dommage.

Ces nouvelles avaient un côté onirique. On plonge in médias res dans l'histoire, on ne peut pas saisir d'emblée tous les tenants et aboutissant et pourtant, on avance en rythme avec le récit et ses protagonistes. Je me suis vraiment laissée happer par les différentes histoires sans faire d'effort particulier, juste en acceptant le texte et les mots tels qu'ils se présentaient et sans brider mon imagination. Je trouve que si l'on connaît ne serait-ce que La Horde du contrevent, nous pouvons retrouver des brides d'univers qui nous sont familiers. Je me suis beaucoup demandée où pouvait se situer ses récits géographiquement et temporellement par rapport aux grands romans de Damasio.