Le livre de Liane

Je referme ce livre les larmes aux yeux, un roman-témoignage bouleversant sur le harcèlement scolaire. Louise habite à Singapour, un sms de son père, envoyé depuis l’autre côté du globe, en France, va faire basculer sa vie en quelques secondes. Sa sœur a été retrouvée morte dans son studio, elle s’est suicidée. Un retour en France, le deuil, et puis les questions. Pourquoi n’ai-je rien vu ? Qu’est-ce que j’ai loupé ? Louise se lance dans une enquête pour comprendre le mal qui a rongé sa sœur, l’ayant poussé à commettre cet ultime geste de désespoir. Grâce aux journaux intimes retrouvés dans l’appartement, Louise va remonter le fil et apprendre à connaître, trop tard, les tourments, les souffrances, les secrets et les démons de sa petite soeur. Un récit extrêmement fort, qu’il m’a été difficile de lâcher. Le récit alterne entre Louise et des écrits de Liane, des extraits de journaux intimes, carnets et autres textes ; ce qui donne une réelle profondeur au témoignage. Les textes de Liane parlent du passé, du présent et du futur qui aurait pu exister ; portés par une plume à la fois douce et poétique mais qui témoignent de sa grande souffrance. Un petit bémol à mon sens à la lecture de ce témoignage : l’inexistence de la famille, autant dans le témoignage de l’après, la mère, le père et la grande sœur sont quasi inexistants, quelles ont été leurs implications et leur analyses de la situation, que dans les écrits de Liane qui n’évoque jamais sa famille. La fin du récit m’a surprise, j’ai beaucoup aimé cette réflexion et cette ouverture positive. « Les mots peuvent tuer […] mais les mots peuvent aussi guérir ». Aujourd’hui il est primordial de mettre l’accent sur la lutte contre le harcèlement scolaire et le cyberharcèlement . Il est nécessaire d’éduquer les jeunes générations. De leur apprendre que dénigrer l’autre ne le rendra pas plus beaux, plus intelligents, plus intéressants, que les mots ont un véritable impact sur la victime. Mais leur apprendre aussi que si, malheureusement, ils font partie de ces victimes, il est capital d’en parler et ne pas s’enfermer dans le silence. Un livre fort, poignant mais nécessaire.

Pas évident de chroniquer ce livre. Le fait qu'il s'agisse d'une histoire vraie, rend la lecture vraiment intense. Et pourtant, c'est une demie déception pour moi. J'ai aimé le fond du roman. L'hommage d'une sœur à une autre, la retranscription des derniers journaux de Liane, l'émotion qui se dégage de la plume de l'autrice. Liane, 23 ans, met fin à ses jours à cause du harcèlement scolaire qu'elle a subi au collège, puis au lycée. Et bien que, comme le dit l'autrice "les mots peuvent tuer", je n'ai pas vraiment saisi la dimension dramatique qui fait que plusieurs années après ce harcèlement, Liane passe à l'acte. Parce que oui, le harcèlement scolaire est censé être au cœur du livre, mais en fait j'ai trouvé le sujet "survolé". Louise part dans une enquête un peu rocambolesque, à propos d'un homme en manteau noir, et cela prend tout le pas sur l'histoire. Alors oui, j'ai été touchée, parce que l'histoire est vraie, parce que ce livre a dû être terrible à écrire, parce qu'on a les photos des journaux de L(D)iane, parce que c'est bien écrit. Mais à certains moment j'ai décroché. Ça n'était pas ce que j'attendais et l'enquête menée par Louise paraît si improbable qu'elle ne m'a pas embarquée.