Lecoindesmots- 18/08/2021

Magistral !

Décembre 1994, la guerre de Tchétchénie bat son plein. Et comme dans chaque guerre, la peur s’installe, l’asservissement commence et les femmes, quant à elles, sont usées et utilisées, dans le but d’humilier et de répandre la terreur. Parmi tous les soldats, il y a Malisch, jeune homme épris de littérature qui s’est enrôlé par dépit amoureux. Deux décennies plus tard, en 2016, une jeune comédienne surnommée « le chat » est approchée par un journaliste allemand, « la Corneille », qui lui propose une mission aussi énigmatique, que tentante. « La Corneille », quant à lui, est obsédé par un certain oligarque russe appelé Alexander Orlov - que tout le monde appelle « le Général » - et les exactions dont il s’est rendu coupable durant la guerre de Tchétchénie. Soudain, ces trois êtres que tout oppose et dont les mondes n’auraient jamais dû se télescoper, se retrouvent propulsés au cœur d’une histoire qui, rapidement, les dépasse tous, qu’ils le veuillent ou non. Et alors que le piège se referme doucement, c’est toute l’horreur, les dégâts et les conséquences à long terme de la guerre que l’auteure brandit comme un étendard. En filigrane, Nino Haratischwili dresse le portrait d’une Russie en plein bouleversements, suite à la chute des régimes communistes, puis de l’URSS et combien les cicatrices sont encore à vif, plus de vingt ans après. La fin du roman, incroyable cliffhanger et véritable point culminant de cette œuvre, transforme cette histoire romanesque en un ex-voto contre la guerre, doté d’un sens de la dramaturgie incroyable. La plume maitrisée de Nino Haratischwili est à ne pas manquer… et le nom de l’auteure à ne pas oublier. Traduit de l’allemand par Rose Labourie.