La maison préservée

Grand auteur néerlandais du XXe, admiré par Kundera, Hermans suspend le temps dans ce roman où se côtoient la violence d'un monde en guerre et la poésie des choses simples. A découvrir dès à présent !

Comment un roman paru en 1952 peut-il être le texte le plus contemporain que j'ai pu lire ces longs derniers mois ? Simplement parce que La Maison Préservée de Willem Frederiks Hermans a tous les attributs du chef d'œuvre en commençant par celui de l'intemporalité. Le narrateur est soldat, en plein combat, dans une troupe de partisans venant de différents pays, sur le front de l'Est. 4 ans de guerre, loin de chez lui, loin des autres par la langue, loin du réel surtout, tant la guerre créé son propre sens, son propre langage, sa propre réalité qui n'a pas besoin d'acteur mais bien de sujets. À l'occasion d'une mission, suite à l'apaisement temporaire des combats, ce soldat pénètre seul dans une maison abandonnée. Il en prend possession, se débarrasse de son uniforme et revêt les habits du propriétaire disparu jusqu'au moment où un gradé ennemi frappe à la porte et demande l'hospitalité pour ses soldats. C'est le point de départ de 80 pages d'une réalité hors-sol et d'un final qui résonne avec les échos de la tragédie ukrainiennes. Point de départ de ce qui se passe quand l'homme est livré à lui-même et à l'opportunité de la violence absolue quand il sort des combats mais pas de la guerre. Troublant et sublime.