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Résumé
Au tournant des XIXe et XXe siècles, la seconde industrialisation supporte une entreprise de rationalisation des activités humaines, repérée par Max Weber comme un trait de l'évolution des sociétés occidentales. En France, la poussée technocratique des ingénieurs rationalisateurs participe au mouvement et porte en elle le germe d'un projet de société que fondent et valident une science et une technique aux visées totalisantes. Henry Le Chatelier (1850-1936), formé à l'École Polytechnique et à l'École des Mines de Paris, est la figure emblématique et militante de ses partisans de l'organisation rationnelle des relations entre la science, l'industrie et l'économie. Si son nom évoque de nombreux domaines de la recherche appliquée à l'industrie, il renvoie surtout à l'implication active de la communauté savante dans le processus dynamique d'organisation scientifique des sociétés modernes. Henry Le Chatelier élabore une notion développée en guise de discipline embrassant toute forme d'activité humaine vouée à la rationalisation de l'économie: la «science industrielle». Il s'en dégage un modèle technocratique de gestion des relations de la science avec la production, l'organisation, la politique, ayant pour figure centrale celle de l'ingénieur scientifique, organisateur et rationalisateur. À l'issue du parcours biographique et d'une histoire de la constitution de la science industrielle, Henry Le Chatelier s'avère incarner un archétype français de l'ingénieur pour lequel la science seule autorise l'action politique. En cela, Henry Le Chatelier et la science industrielle participent d'une tradition toujours à l'oeuvre qui tend à mobiliser sans complexe la notion de «rationalité» comme fondement d'une légitimation de choix de société non négociables.