Le Raspail vert

Je venais d'emménager avec Joaquina sur le vert boulevard Raspail après ma longue opération à coeur ouvert et m'étais installé en terrasse du café Le Gymnase pour griffonner un peu de papier. Le garçon me servit une limonade. - Qu'est-ce que vous écrivez encore ? - Tais-toi, Edouard, je ne sais pas. J'écris la fin, la quatrième de couverture de mon livre. Je ferai le reste après. Il faut accrocher le badaud, celui qui ne voudra pas ouvrir le livre avant de l'acheter. Le plus dur, c'est de dire du bien de soi, crois-moi. - « Monsieur B, dit Edouard, est déjà l'auteur de quelques tomes de ses mémoires, Place des Vosges, Rue de Beaune, La Porte dorée... » - Pas très vendeur, mon cher Édouard. - Parlez donc de vos premiers émois, de l'amour. Vous avez eu des chagrins, fait des victimes ? - Comme tout le monde, Edouard. Mais jamais exprès. - On croit ça. Quoique. Alors, un glaçon ou pas du tout ?