Breakwater

Cette BD parle de la vie en général avec une certaine mélancolie poétique. J’ai beaucoup aimé suivre des personnages matures, cela change un peu des livres idéalisés.

Il y a ce qu’on rêve d’être ou de faire et puis il y a cette putain de réalité qui tire vers le connu, le certain, l’ordre des choses. Les étés passent comme les années et il peut arriver qu’on reste immobile, dans son carcan. Il n’est pas toujours désagréable, on y trouve de quoi s’occuper ou de quoi de se rendre utile quand c’est pas indispensable. On se plaît à s’imaginer que c’est cette stabilité qui permet d’être heureux et qu’elle pourra se renouveler ou se réinventer pour toucher un jour à nos envies refoulées. Jusqu’à une rencontre, un étonnement, une évidence qui vient tout bouleverser. Dans Breakwater, on suit Chris, dans sa routine, son boulot dans un vieux cinéma, ses soirées solitaires, ses rêves éteints. Puis Dan arrive, tel le deus ex machina des pièces d’antan et bouleverse l’ordre des choses. C’est lent et ça nous permet d’entrer en lassitude de la vie de Chris. C’est doux car ici peu de choses viennent perturber la monotonie paisible exprimée. Les dessins accompagnent parfaitement cette nonchalance, tout en noir et blanc, précis dans les détails quand il n’y a que peu d’éléments perturbant pour s’en détacher. Katriona Chapman arrive cependant à nous embarquer et à nous faire attendre un but à tout ça. Parfois il n’est pas possible d’aider les gens. Trop de couches se superposent pour qu’on puisse les sortir de leurs démons. Ça dépend de ce qu’on est capable d’entraîner chez eux et de proposer pour casser la spirale. Il suffit souvent d’un rien pour que les décisions même difficiles et vertigineuses apportent le nécessaire de vie pour tout changer. C’est un échec dans Breakwater, mais ce n’est ni une raison pour s’y résoudre ni pour passer à côté de cette belle lecture.