La popularité de ce livre sur Gleeph
Résumé
La langue de John Donne (1572-1631), dite «explosive» par Virginia Woolf, respire la passion. Passion érotique dans les poèmes de jeunesse, passion religieuse dans les textes plus tardifs ; devenu prédicateur anglican, le poète électrise les foules, et ne cesse de prôner l'union de l'âme et du corps - nature duelle et mystérieuse, «condition» humaine dont le sentiment nous permet avec délice d'éprouver les limites. Lire Donne, c'est se confronter au paradoxe précieux selon lequel une langue peut être à la fois prosaïque et métaphysique, quotidienne et sublime. Il existe de multiples manières de signifier nos sentiments, mais toutes ne les transmettent pas. Le vrai poète lyrique pratique avec succès ce que Julie Neveux appelle le «lyrisme indirect», l'expression des sentiments sans recours au sens explicite des mots mais grâce aux relations inédites qu'ils nouent implicitement entre eux. La métaphore, dont la motivation n'est pas celle de la comparaison, en est l'exemple le plus connu. Dans cet essai, on observe le processus fragile par lequel le corps s'invite, et le sentiment se «réalise», dans le discours poétique de John Donne. Examinant les rapports que le poète tisse avec la langue et avec son objet en donnant forme au sens, Julie Neveux montre comment une signification implicite, autre paradoxe, implique le sujet parlant, et convient à la plus juste, la plus précise expression des sentiments. Analyse littéraire et analyse linguistique, ce livre original aide à comprendre l'art d'un poète. Il apporte la preuve éclatante qu'une phénoménologie du sens est possible, et partinente pour expliquer la langue quand elle fait corps. Pierre Cotte