Bouvard et Pécuchet : avec un choix des scénarios

C'est presque comme si on entendait Flaubert ricaner de ses deux bonshommes et de la bêtise environnante. Comme souvent avec Gustave, on rit beaucoup, on se moque, mais on compatit aussi, on les aime nos deux gaillards adorablement perdus dans leur bibliothèque sans fond, hurluberlus soifards de savoir sans conscience, boulimiques d'érudition grossière. Emplis de bêtise certes, mais voulant si bien faire que c'en est touchant. Manifeste d'une époque en pleine recherche, toute la connaissance se mélange et s'approxime. Cherchant naïvement une vérité introuvable, aucune piste n'est négligée : véritable escalade dans les sujets de leurs études, plus ça va plus c'est confus. Leur entourage (bonnes, médecins, maire, fermier, curé, nobliau et bourgeois locaux), aussi bornés qu'eux sont fantasques, les repoussent dans des retranchements abstraits et charlatanesque. C'est bien triste que Flaubert soit mort avant d'avoir pu dénouer cette épopée intellectuelle désastreuse, dernier témoignage d'intelligence et d'ironie d'un de nos plus grands stylistes