Combats et métamorphoses d'une femme

"On choisit pas ses parents, on choisit pas sa famille". Une mise à nu sans concession de l'auteur sur l'ambiguïté de l'amour filial dans la construction de l'adulte en devenir. Le regard d'autrui fausse le sentiment d'appartenance de caste rend confus le choix de la tribue. Bouleversant d'amour et de rédemption !

Les livres d'E Louis partagent la même force. Cette fois c'est de sa mère dont il nous parle. Nord de la France, misère sociale, homophobie, violence verbale ou physique, comment se construire ? Il nous raconte la vie étouffée de sa mère, qui dès 16 ans doit faire une croix sur ses ambitions, modestes pourtant, en ayant un premier enfant et une vie au foyer qui s'annonce. Un foyer ça peut aussi se concevoir comme un lieu sécurisant, agréable quoique restreint mais ici il est synonyme de corvées, d'humiliation, de restriction et de crainte. Sans indépendance financière, difficile d'imaginer une porte de sortie. Mais à l'instar de son fils qui a fuit son milieu pour faire des études et s'émanciper, elle réussira, passée 45 ans, à tout quitter et refaire sa vie. C'est évidemment dur, violent, mais il y a aussi de l'espoir dans ce livre puisqu'on voit qu'une autre voie est possible. Pas un autre monde car E Louis continue malgré tout à détester ce monde qui tolére de telles injustices.

À la suite d’Albert Cohen et son Livre de ma mère, Edouard Louis écrit une déclaration d’amour à sa mère dont la vie a été bousillée par sa condition de femme et de pauvre.

Combien d'entre nous ont-ils déjà ressenti ce qui est décrit dans ce livre ? On se laisse emporter par ce récit autobiographique poignant. Tout y est politique, mais il ne faut pas en avoir peur, il faut l'affronter. J'aimerais que ce livre reflète l'histoire de nombreuses mères. J'aimerais que ce soit l'histoire de ma propre mère. Ce récit c'est une petite victoire, jouissive et motivante mais qui doit se faire encore plus commune. Certes, c'était un peu parfois larmoyant mais étant donné le sujet c'est compréhensible.

Où l’on retrouve les thèmes chers à Édouard Louis- la violence familiale, l’alcoolisme, la pauvreté, l’homosexualité - mais aussi cette volonté chevillée au corps de combattre ce fatalisme social et familial à travers une écriture haletante, qui enfle et gonfle au gré de la mémoire et qui semble vouloir, Elle-aussi, éviter les écueils de la vie.