Les identités meurtrières

Ce n’est qu’à la fin de ma lecture que j’ai pris connaissance de la date de publication. 1998… Cet essai a été écrit il y a plus de 20 ans! Pourtant au regard des événements meurtriers qui ont eu lieu ces dernières années, les observations d’Amin Maalouf semblent avoir été écrites la veille. Il est regrettable de constater que ses remarques ne semblent pas aussi évidentes en 2023... Extrait : “Pour ce livre, qui n’est ni un divertissement ni une œuvre littéraire, je formulerai le vœu inverse : que mon petit-fils, devenu homme, le découvrant un jour par hasard dans la bibliothèque familiale, le feuillette, le parcoure un peu, puis le remette aussitôt à l’endroit poussiéreux d’où il l’avait retiré, en haussant les épaules, et en s’étonnant que du temps de son grand-père, on eût encore besoin de dire ces choses-là.”

Bien que je ne sois pas en accord avec tout ce qu'il dit (notamment sur l'envie de l'émergence d'une civilisation humaine), je trouve cet ouvrage très intéressant. L'auteur a tout d'abord de nombreuses connaissances historiques qui permettent de rendre cet ouvrage complet. Ensuite, cet ouvrage est un mélange de réflexion et d'expérience personnelles de l'auteur ce qui permet de comprendre plus aisément certaines de ses positions. Enfin, il me semble que, dans notre contexte actuel, l'ouvrage trouve sa place. En effet, l'auteur critique le système de discrimination positive (tant porté à cœur par certains mouvements indigènistes), prône le respect de la dignité de chaque langue et de culture (très important à l'époque de la "cancel culture") , évoque un vivre ensemble basé sur le respect des uns des autres, et propose tant d'autres réflexions sur "l'identité". Le seul défaut de l'ouvrage est sûrement sa longueur hélas trop petite. En effet, j'aurai grandement aimé voir Amin Maalouf développer plus amplement certaines de ses pensées.

Une analyse extraordinaire de la notion d’identité qui devrait être une référence incontournable dans le contexte actuel.

Un roman passionnant et très accessible qui traite de la notion d’identité. Le livre aborde plusieurs questionnements que je résumerais en « comment construire son identité tout au long de sa vie et comment l’adapter face aux changements qu’ils soient environnementaux, politiques ou culturels ? » Pour se faire, l’auteur illustre ses propos en s’appuyant sur le rôle de la religion, de la nationalité et de la langue, notamment avec sa propre expérience. On aborde alors l’importance de l’identité dans l’enrichissement de l’Homme ainsi que dans ses relations avec autrui. Mais l’auteur s’interroge par la suite sur un paradoxe universel : l’identité est responsable de la singularité de chacun, ce qui en fait la plus grande richesse de l’humanité mais elle est à l’origine des conflits qui ont traversé les époques et l’espace. Pour étayer son discours, Amin Maalouf va évoquer les plus grands enjeux de notre siècle : la mondialisation, l’immigration et plus précisément l’Union européenne.

Je m’attendais pas à ce que ce petit essai d’à peine 200 pages puissent être si captivant, enrichissant et désarmant. La reflexion est construite telle une dissertation. Les thèses évoquées sont reprises et argumentées puis une solution est proposée. Les exemples libanais ou rwandais sont fort intéressants mais nécessitent une solide connaissance historique. La quête d’identité est encore aujourd’hui 26 ans après la rédaction du livre, un sujet toujours au coeur des débats et sur ces mêmes thématiques. Il apporte ici quelques ébauches de réponses mais surtout des axes de réflexions passionnants à cultiver par soi-meme.