Chef d'œuvre

Je vais essayer ici, de présenter à mon modeste niveau, la touchante histoire de ce roman au titre fabuleux, en tentant de partager avec vous les impressions majestueuses provoquées chez moi lors de sa lecture. Darrell Standing a un compte à régler avec le système carcéral. Enfermé dans la prison de Saint-Quentin, il y purge une peine à perpétuité dans des conditions sordides, pour avoir, dans un moment de folie, tué l'un de ses collègues, professeurs d'université. Un malheur n'arrivant jamais seul, il a répondu à la violence d'un gardien en lui assénant un coup de poing, le condamnant à la peine de mort. Confiné à l'isolement en attendant le jour de son exécution par pendaison, il subit la folie d'un directeur sadique agissant en toute impunité. Viendra alors le supplice de la camisole, et avec lui, paradoxalement, l'abandon du corps et la libération de l'esprit. Dépasser les douleurs atroces des nerfs torturés par les dizaines d'heures de camisole grâce à l'auto-hypnose, et amener son cerveau dans un état de sérénité tel, que Darrell Standing va réussir l'exploit de s'évader... par la pensée ! Il est impossible d'enfermer un esprit, et le sien va revivre au gré de multiples voyages, ce qu'ont été ses vies antérieures. Il va nous les conter, à la manière d'un homme condamné, qui bientôt délaissera une nouvelle fois son enveloppe pour s'en aller vivre une nouvelle expérience. Autant vous dire que j'ai pris un plaisir rare à lire ce roman, et qu'une passion inextinguible m'a emporté de bout en bout. C'est une charge contre le système carcéral américain du début du XXème siècle, véritable chien de garde du système capitaliste. Jack London qui a été emprisonné, témoigne de conditions de détention à faire pâlir un maton. Mais au delà de la dure réalité de l'enfermement, il y a le magnifique onirisme de l'évasion de l'esprit, digne, que l'on y croit ou non, des expériences des plus grands mystiques. C'est un roman diablement intelligent, philosophique, peuplé de réflexions sur le caractère périssable du corps, qui diverge de celui immuable de l'esprit.