Je connais Macha Méril en tant que comédienne, je l'ai vue jouer dans plusieurs films, j'ai toujours aimé sa grâce et sa manière d'incarner un personnage. Cela fait un petit moment que je sais qu'elle écrit également des romans, je n'avais pas encore eu l'occasion de la lire, et je suis très contente de l'avoir enfin découverte en tant qu'autrice. Ce roman en particulier m'a attirée à cause de la mention de grands noms de stars féminines en quatrième de couverture, toutes ont eu un destin tragique. J'ai donc encore eu plus envie de découvrir celle imaginée par l'écrivaine. Et cerise sur le gâteau, cela se passe à Venise, un lieu que je ne connaitrais surement jamais mais qui m'intrigue.
L'histoire de ce roman se passe dans le monde du cinéma, bien connu de l'autrice. J'aime découvrir les coulisses, et quoi de mieux qu'une comédienne pour en parler. Comme je me doutais, c'est un milieu particulier très bien retranscrit. Elle a donc mis en scène un personnage féminin, Mélusine, qui a quarante ans, est une grande star renommée, même si elle a perdu un peu de son faste. Elle doit tourner à Venise un film mis en scène par un grand nom réputé de ce milieu, c'est une adaptation moderne d'Othello. Cela se passe en 1977, c'est important de le souligner pour mieux comprendre les événements, pas de téléphone portable, pas d'internet et de réseaux sociaux, mais cela n'empêche pas aux paparazzis d'exister et de poursuivre avec acharnement les vedettes. On va suivre ainsi les débuts du tournage du film, la mise en place des acteurs, des décors, avec toutes les difficultés que tout ce petit monde peut rencontrer : une star qui se fait désirer, les nuits un peu trop festives qui mettent à mal les journées de tournage, les enjeux financiers... Rien ne se passe trop comme l'aurait voulu le metteur en scène.
Mélusine est en plus très caractérielle, capricieuse, lunatique, elle a tout de la petite fille gâtée à qui on ne refuse rien sous peine d'un esclandre. Je dois dire qu'elle m'a plutôt agacée au début de ma lecture. Mais au fur et à mesure, j'ai découvert la vraie personnalité de cette femme, et une certaine sensibilité qu'elle cache bien. Elle extériorise sa souffrance intérieure par des frasques, des scandales. Sa vie sentimentale et privée est un fiasco, elle a un fils adulte qui ne l'épargne pas. C'est aussi une femme très moderne et décomplexée de tout, elle n'a pas peur de se montrer alcoolisée, d'afficher ses envies sexuelles, là dessus aussi elle ne sait pas trop où elle en est. On sent la souffrance dans tout ce qu'elle essaie de montrer. C'est un personnage vraiment complexe, qui ressemble en effet aux stars connues mentionnées dans le résumé.
Il n'y a pas que Mélusine dans cette histoire. Il y a beaucoup de personnages, peut-être un peu trop. J'ai dû me faire un petit mémo avec le nom de chacun et leurs fonctions dans le livre. Entre le producteur, le metteur en scène, le distributeur, le danseur, l'impresario, l'attaché de presse et tous les autres, il y avait vraiment de quoi tous les mélanger lorsqu'ils étaient nommés par leur prénom. Mais avec mon mémo, j'ai pu aisément remettre tout le monde à sa place et ainsi mieux comprendre leur rôle. Disons qu'il y a quatre ou cinq personnages qui reviennent plus souvent et ont un peu plus d'importance : Mélusine bien sûr, Eric le metteur en scène, Epstein le producteur, Ariel et Lena. Ces deux derniers personnages n'ont rien à voir avec le film. Ce sont deux frère et soeur qui arrivent d'un autre pays et se font voler leurs papiers en arrivant à Venise. Eric, qui a assisté à la scène, les recueille dans sa suite en attendant de trouver une solution. Il va avoir alors l'idée d'employer Ariel comme garde du corps de nuit de Mélusine, afin de l'empêcher de sortir. Ariel va tomber amoureux de l'actrice, et le pauvre, ne sait pas dans quoi il met les pieds.
Bizarrement, c'est justement à Ariel et Lena que je me suis le plus attachée. Mélusine m'a laissée par moment indifférente, elle est agaçante au début, c'est vrai qu'en apprenant à la connaitre, ce sentiment a changé, mais j'ai moins ressenti d'affection pour elle. La narration à la troisième personne creuse justement ce fossé et met une certaine distance entre le lecteur et le personnage principal. J'ai commencé à vraiment ressentir de l'affection pour elle lorsqu'elle s'exprimait à la première personne, et surtout lorsque ses pensées étaient relatées. C'est là que je l'ai le mieux comprise. D'ailleurs, le texte est entrecoupé comme cela de parties en italiques représentant les pensées intérieures des différents personnages. Cela permet de connaitre l'avis de chacun sur une même situation. Mais c'est parfois aussi déroutant, car je n'ai pas toujours réussi à deviner dès le début l'auteur de ses pensées, et en le découvrant, je relisais pour mieux situer.
Il y a ainsi quelques petits défauts qui font que la lecture est parfois moins facile. J'ai trouvé quelques longueurs qui font que parfois je me suis ennuyée. Mais en même temps, j'avais envie de savoir ce qui allait arriver à chacun, plus particulièrement à Mélusine et à Ariel et Lena. Il règne ainsi un certain suspense, une atmosphère tendue que j'espérais voir s'améliorer. Ce sont les cinquante dernières pages qui ont été les plus captivantes pour moi. Les événements se sont enchainés plus vite, rendant la lecture plus addictive.
Et puis bien sur, il y a Venise, et le palazzetto, qui à eux seuls pourraient être des personnages à part entière. Macha Méril décrit très bien la ville, les déplacements en gondole, les bâtiments majestueux, comme le palazzetto où vit Eric. Les descriptions sont tellement belles que je suis allée voir sur le net pour voir si elles correspondaient bien. Le palais est majestueux et Macha Méril trouve les bons mots pour le décrire et pour lui restituer toute sa beauté. On sent qu'elle connait bien le sujet, vu qu'elle a justement vécu en Italie dans les années 70. Rien que pour ça, j'ai aimé ce livre. Je m'y suis vue, et surtout ça donne très envie de voir cette ville.
J'ai tout de même passé un bon moment avec ce roman. Il m'a permis de découvrir Macha Méril en tant qu'écrivaine, et j'ai très envie de la lire à nouveau. Elle a écrit d'autres romans sur ses origines russes qui me donnent très envie et que je vais rajouter à ma wishlist.
Le milieu du cinéma, les lieux, les personnages sont la grande force de ce roman, ainsi qu'une belle plume, qui décrit bien sans trop alourdir. En faisant des recherches, j'ai appris que ce livre était déjà sorti en 1982 sous un autre nom "La star". J'ai alors mieux compris certains points qui pêchaient un peu, et un petit manque de modernisme. Ce qui ne m'a pas empêchée tout de même de passer un bon moment. J'ai trouvé la fin particulièrement belle et très lumineuse. J'ai eu peur au vu du destin de Mélusine, que cela soit sombre, mais non, j'ai été agréablement surprise et j'ai quitté ce petit monde contente de les avoir rencontrés. Car, finalement, je me suis tout de même attachée à eux, et j'avais très envie que tout se passe bien pour eux.
Si vous aimez les histoires avec comme décor le milieu du cinéma, voir les coulisses du tournage d'un film, je ne peux que vous conseiller la lecture de ce livre. Et si en plus vous aimez Venise, alors là, vous serez gâtés.
Un livre intéressant sur le milieu du cinéma
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