Nat_lacreusoise- 21/04/2024

Recoller les morceaux de l'histoire familiale

Ma famille est séfarade. La carpe farcie, je n'en ai mangé qu’une seule fois, Chez Francine et Léon, non loin de la rue des Archives à Paris. Pour être honnête, j'ai trouvé ça épouvantable, même si pendant quelques années, ce petit resto ashkénaze est devenu ma cantine. Mais comme Élise, mes racines baignent dans les goûts de mon enfance, cette cuisine qui a traversé la méditerranée et maintenu ce lien ténu et tendu entre deux rives. Les goûts de l'exil. Tout commence donc, dans ce livre composé de fragments, par la cuisine ashkénaze et le yiddish, deux piliers de sa mémoire qui constituent la colonne vertébrale de l'histoire familiale. Recoller les morceaux, c'est ce que fait l'autrice en avançant dans son texte. Toutes les recettes y passent. Et tous ces jolis mots de yiddish qui sonnent comme des grelots sur notre chemin. Petit à petit, l'histoire familiale se recompose sous nos yeux, par petites touches impressionnistes. Le parcours de ses grands parents venus de Pologne après de nombreux détours, pogroms, fuites et humiliations, la guerre, l'histoire de ses parents. On se perd un peu en route puis on finit par retrouver un fil dans ce dédale. C'est tendre, émouvant, mélancolique et discret, comme la culture ashkénaze, avec une petite touche d'autodérision pour conserver la bonne distance émotionnelle, mais c'est aussi fort et réconfortant.