A l’été 1964, Mitch Newman, un photoreporter au creux de la vague, apprends le suicide de son ex-fiancée, elle aussi journaliste. Bouleversé, il cherche à comprendre pourquoi Jean, qu’il a aimé follement, a pu commettre un geste aussi désespéré et qui lui ressemble si peu. Assez vite, il comprend que Jean enquêtait sur l’élection présidentielle de 1960 et avait acquis la certitude que Kennedy avait truqué les élections pour l’emporter. Est-ce cette enquête qui l’a amené à Dallas en novembre de l’année précédente ? Pourquoi était-elle à Dallas le 22 novembre 1963, le jour où Kennedy était en visite officielle, et pourquoi a-t-elle cherché à rencontré un certain Jack Ruby ? RJ Ellory tente, avec « Le jour où Kennedy n’est pas mort » un exercice fort périlleux, une sorte d’uchronie qui part du principe que le 22 novembre 1963, rien ne s’est passé sur Dealey Plaza. Stephen King s’est essayé lui aussi à l’exercice, pris sous l’angle du voyage dans le temps d’un homme déterminé à empêcher le pire. Ici, rien de tel, on suit l’enquête de Mitch Newman sur les traces de l’enquête de son ex fiancée. Peu à peu s’imposent à nous des noms et des mots bien connus, mais qui pour lui ne signifient encore rien : Dealey Plaza, Jack Ruby, Elm Street, Winchester Carcano, Dépôt des livres scolaires et à la fin, l’inévitable Lee Harvey Ostwald. Sur la forme c’est sympathique à lire, efficace et relativement clair. Sur le fond, puisque nous sommes dans une fiction, Ellory peut se permettre de dépeindre Ostwald comme un communiste convaincu et illuminé, ce qui est largement sujet à caution quand on connait un peu l’histoire de cette tragédie. Mais qu’importe, au fond, son sujet n’est pas de faire une enquête sur la réalité mais d’inventer une fiction. Parallèlement à l’enquête, certains chapitres mettent en scène John, Jackie mais surtout Bobby Kennedy. Autant Bobby et Jackie sortent assez grandis du portrait qu’en fait R.J. Ellory, autant John Kennedy prends cher : odieux, obsédé sexuel, camé par les médicaments, manipulateur et sans scrupules, le Kennedy du roman est assez éloigné du mythe crée par sa mort tragique. Si Ellory pose des questions intéressantes sur la fraude électorale (supposée) de 1960, il se garde bien de dépeindre le perdant, Richard Nixon comme un parangon de vertu, heureusement ! Dans l’ensemble, le pari audacieux de R.J. Ellory est-il réussi ? Oui et non. Oui parce que le roman fonctionne, il se lit facilement et on comprend tout d’une histoire malgré tout assez complexe. Mais non parce que la conclusion laisse un peu perplexe, le dénouement est un poil expéditif, et on reste malgré tout un peu sur notre faim quant à la mort de Jean. L’un dans l’autre, c’est un roman qui ne manque pas d’intérêt et de qualités, à condition bien sur de ne pas le prendre pour autre chose qu’une pure fiction et non une énième tentative pour réécrire ou réexpliquer l’assassinat politique le plus emblématique de l’après-guerre.
Tentative d’uchronie
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