Evergreen13- 08/12/2023

La Nation Bison 🇺🇸🖤🖤🖤

Encore une excellente lecture découverte grâce à la collection Totem des Editions Gallmeister ! Destination le Dakota du Sud, un Etat où l’on peut visiter, entre autres, le Mont Rushmore et le parc national des Badlands. C’est à un tout autre « tourisme » que nous invite l’auteur, David Heska Wanbli Weiden, un voyage sombre au sein d’une réserve indienne, celle de Rosebud qui appartient à la Nation Lakota. En réalité, ces territoires restent la propriété de l’Etat fédéral américain, ils ne sont que « prêtés » aux indiens pourtant les habitants originels… Certaines parcelles sont même vendues à des « non-indiens » ce qui ne va pas sans créer des conflits. Autre sujet relatif aux réserves, celui de la justice : en effet, depuis le Major Crimes Act (1885), la police tribale n'a aucune compétence pour instruire des affaires criminelles sur son propre territoire... Dès qu'il s'agit de meurtres ou d’agressions sexuelles, elle doit en référer aux autorités fédérales qui, beaucoup trop souvent, s’en désintéressent totalement et n'engagent aucune poursuite, quand bien même le coupable est identifié. Une seule solution : engager un justicier. C’est le job de Virgil Wounded Horse : sang-mêlé, il élève seul son neveu depuis le décès de sa sœur. Virgil a tenté de quitter la réserve (« Je me demandai si je pourrais un jour vraiment quitter la réserve, car elle se trouvait dans mon esprit, une réserve virtuelle, dans laquelle j’étais apparemment indéfectiblement coincé ») et de renier ses racines lakotas mais il a finit par trouver un peu sa place et a le sentiment d’œuvrer pour le bien commun en punissant ceux qui échappent à la justice. Comme ces trafiquants de drogue qui commencent à infiltrer le territoire de Rosebud. Tant qu’il s’agissait d’un peu d’herbe, tout le monde fermait les yeux mais maintenant, il s’agit d’opioïdes et d’héroïne, directement importés du Colorado. Le responsable de ce trafic serait un certain Ricky Crow, bien connu de Virgil que Ben Short Bear, membre éminent du conseil tribal, engage pour le retrouver et lui faire passer l’envie de dealer à Rosebud.     Ce polar noir est le premier roman de David Heska Wanbli Weiden lui-même membre de la Nation Lakota, et c’est incontestablement une réussite. Au-delà de l’intrigue policière (qui parfois, recèle quelques faiblesses) c’est un véritable plaidoyer pour les amérindiens dont le sort ne peut qu’émouvoir et révolter. Dans les réserves, le taux de pauvreté est ahurissant. Il rime avec alcoolisme et usage de stupéfiants, violences diverses et variées, dont on a un bon aperçu avec ce roman (attention, certaines scènes sont à la limite du supportable, je pense notamment à celle du chapître 14 et au petit Mikey). Fort heureusement, l’auteur ne reste pas que sur les mauvais côtés : au sein du peuple lakota par exemple, il y a de nombreuses initiatives solidaires et innovantes (l’auteur met l’accent sur la nourriture et la manière de changer les habitudes alimentaires désastreuses entraînant diabète, obésité morbide et obérant l’espérance de vie) ainsi qu’un certain retour aux traditions, spirituelles et culturelles. Virgil lui-même devra se réconcilier avec ces traditions pour parvenir à résoudre une enquête très personnelle. Premier roman très prometteur, je guetterai le suivant.