À l'inverse du roman cliché où l'on suit plusieurs personnages qui se confrontent les uns aux autres, chacun visant plus ou moins une quête à résoudre au fil de l'histoire, Désolations prend un chemin complètement opposé, et met en scène une famille sur laquelle s'abat la mélancolie la plus dévastatrice qui soit. Au sens Lars von Trier, n'ayons pas peur des analogies. Pas de rédemption, de happy end, de promesses d'une vie meilleure ou d'une amélioration quelconque. Du pur et du grand David Vann encore une fois.
Dès les premières pages, on sent les failles qui pourraient tout faire éclater, surtout quand on est un habitué de l'oeuvre de l'auteur, qui arrive à crée un personnage pour chaque facette de sa propre personnalité (et je trouve ça dingo, sérieusement). Désolations ne déroge pas à la règle des thématiques chères à l'auteur ; l'auto-apitoiement, le suicide, la tare génétique que l'on transmet et qui impact la vie des autres figurants venus traverser la vie des personnages principaux, la chasse, la pêche, les passions pour la tragédie grecque et les traductions de textes nordiques...
Et si Stephen King est un digne représentant du Maine, sachez qu'en ce qui concerne l'Alaska, vous pourrez toujours faire confiance à David Vann pour saisir toute la désolation (hinhin) de cette région en la magnifiant au point de la rendre aussi importante que n'importe quel personnage de ses romans.
On a donc un père qui a complètement raté sa vie mais qui s'accroche toujours plus à des rêves sans avoir de mode d'emploi assez efficace pour qu'ils puissent se réaliser. Sa femme, qui s'est enfermée dans ce mariage, où son seul rôle a été celui d'une mère et d'une épouse invisible et qui commence sérieusement à craquer en somatisant des migraines foudroyantes. Une fille souhaitant à tout prix faire rimer vie réussie avec mariage et enfants sans connaître vraiment son futur mari et un frère qui se défonce à longueur de journée en trimant comme un malade en allant risquer sa vie à pêcher du saumon, seul personnage à mon sens qui s'en sort à peu près bien.
Si le roman peine un peu à démarrer, cette mélancolie, dont on hume les odeurs au début, vient littéralement se plaquer sur chaque personnage faisant monter la tension, nous rendant complètement accro, parés à ce que tout s'embrase à n'importe quel moment. Sauf qu'en tant que pyromane qui se respecte, l'auteur insuffle ce qu'il faut de talent et de poésie pour que les personnages se consument en douceur ; le chaos et la mort avaient l'air de s'ennuyer alors autant leur donner satisfaction en leur permettant de prendre tout le temps qu'il faut.
Et tant mieux, parce que du coup, pour un roman qui se veut déchirant (mais sans surprise), c'est vraiment servi comme un festin de rois !
Désolations
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