Chris5867- 21/04/2022

En bord de piste

Suite à leur sortie de route déontologique (voir « Tu tairas tous les secrets »), Lola et Zoé, les deux enquêtrices du 36, ne sont plus chargées des affaires criminelles. Tout leur groupe est désormais assigné à la lutte antiterroriste. C’est à ce titre qu’elles sont appelées à Roissy pour y appréhender un libanais détenteur de pièces de monnaie de l’État Islamique. Sur place, elles tombent sur un important incendie de plusieurs voitures en bord de piste, et dans le coffre de l’une d’entre elle, un corps carbonisé. En jouant un peu des coudes, elles finissent enfin par se faire officiellement saisir du dossier, renouant ainsi avec l’investigation criminelle. La victime est rapidement identifiée, une jeune femme « data scientist » d’Aéroport de Paris. Mais l’enquête s’annonce complexe : les enjeux écologiques du transport aérien, la guerre entre taxis officiels et taxis clandestins, le travail dissimulé chez les bagagistes, l’implantation d’une ZAD en bord de piste, les ramifications de cette affaire peuvent être multiples et même entremêlées. Depuis son tout premier polar, j’avais pris de plus en plus de plaisir à la lecture des romans d’Hervé Jourdain, j’aime son côté « auteur procédurier » qui n’élude ni n’enjolive rien de la réalité de la police d’aujourd’hui, j’aime qu’il ait fait de deux femmes, différentes, cabossées mais complémentaires, les héroïnes récurrentes de ses aventures. Mais là, j’ai eu du mal… La faute non pas au style d’Hervé Jourdain, mais à la complexité de cette histoire qui, à mes yeux, ne manipule pas des concepts passionnants et facile à appréhender. J’ai rarement lu un polar partir autant dans tous les sens, une multitude de personnages, de pistes diverses et variées, du petit voleur d’ordinateur aux cabinets ministériels, en passant par les taxis clandestins, les « emballeurs » (on découvre de quoi il s’agit à cette occasion), les zadistes, et toutes une ribambelle de personnages intermédiaires. Composé de 10 gros chapitres, « Terminal 4 » nous apprends certes pas mal de chose sur le fonctionnement d’un aéroport et le poids du lobby du transport aérien mais que ces sujets ne sont pas sexy ! Il y a même des passages (heureusement courts) avec des formules mathématiques sur la consommation de carburant, la masse du CO2 et j’en passe ! Je comprends bien le sujet sous-jacent de « Terminal 4 » (dénoncer le cynisme d’un transport aérien toujours plus vorace, toujours plus polluant et qui bidouille cyniquement les chiffres qui lui déplaisent) mais bon, il faut se faire carrément violence par moment. C’est peut-être tout personnel, mais je ne suis jamais réellement entrée dans son livre, j’ai l’impression d’être restée à côté de son sujet et de commencer à l’oublier alors que je l’ai terminé hier ! Et puis bon, le côté militant écolo, ça devient un thème récurent, et qu’on met un peu à toutes les sauces… Quant au dénouement, il est certes un peu étonnant, plutôt réussi (et pour le coup étrangement limpide au vu de ce qui le précède) mais on ne peut pas s’empêcher de penser, une fois le livre refermé : « Tous ça pour ça ?! ». « Terminal 4 » est le premier roman d’Hervé Jourdain à me faire cette impression mitigée. Mais je vais continuer de lui faire confiance, ce serait-ce que pour retrouver avec plaisir Zoé et Lola. Leur amitié, leur complicité, leur duo professionnel même sort de cette enquête très malmené, et on a envie de savoir si elles vont surmonter leurs problèmes pour revenir enquêter au Bastion.