Revoilà Hervé Jourdain avec son nouveau roman, « Femme sur écoute » (je ne suis pas fan du titre), Hervé Jourdain, policier le jour et écrivain la nuit (ou les week-ends, ou quand il est de permanence, allez savoir… !) nous livre ici un polar complexe mais pas tortueux, peut-être un peu plus ambitieux que ces trois précédents romans. Trois histoires, qui ne semblent avoir aucun point commun, vont venir s’entrechoquer, s’entremêler et se parasiter. Il y a Manon, une strip teaseuse (un peu prostituée sur les bords) à qui il arrive des choses bizarres (piratage de son compte Facebook, de son compte bancaire, cambriolage puis pire) et son petit ami emprisonné à Fleury n’y est certainement pas pour rien, de près ou de loin. Il y a aussi cette journaliste fouineuse retrouvée morte dans les catacombes. Et puis enfin, il y a le suicide du fils du commissaire Compostel, suicide sur lequel il y a encore beaucoup à apprendre. Le seul dénominateur commun de ces trois enquêtes, c’est la poignée d’enquêteur du « new 36 » qui en est chargé. Le roman de Jourdain est assez complexe, les intrigues se succèdent et au début, on ne voit pas le rapport et on a un peu peur de s’embrouiller mais en fait, on ne décroche jamais. C’est le talent d’écriture de Jourdain qui emporte le morceau, la construction intelligente de son roman, ses chapitres courts qui s’enchainent bien, le nombre assez restreint de personnages et leur personnalité souvent attachante aussi. L’intrigue va mener Le commissaire Compostel et les jeunes Lola Rivière et Zoé Dechaume bien plus haut dans la hiérarchie policière et politique qu’ils ne l’imaginaient, tellement haut qu’on se dit qu’ils vont perdre la partie devant d’aussi gros morceaux. Jourdain ose s’aventurer dans la sphère de ces politiciens qui se disent trop ouvertement « amis de la police » et leur règle leur compte. La fin est sans doute un peu trop naïve et optimiste mais elle ça ne fait pas de mal, de temps en temps, un peu de morale et de naïveté dans les polars ! Ce qui est bien avec Jourdain (comme avec Jean-Marc Souvira ou Olivier Norek), c’est qu’ils connaissent bien la maison « police » et ils ont sur son fonctionnement un regard averti et assez critique. Tracasseries administratives, collusions politiques, problème de déontologie, de machisme, de guéguerre entre groupe ou entre services, Jourdain connait tout ça et dans « Femme sur écoute » encore plus que dans sa trilogie précédente, il ose appuyer un peu plus fort là où ça fait mal. Encore mieux, il ose mettre en scène un policier franchement infréquentable (pire que dans « Braquo » !) et ose également présenter une police moins corporatiste qu’on ne l’imagine parfois. En refermant le roman, je me suis demandé si Jourdain avait décrit la police qu’il connait où celle qu’il appelle de ses vœux, surement un peu des deux… Mais au fond qu’importe, avec « femme sur écoute » il signe un de ses meilleurs romans, un des plus aboutis et percutant.
Trois enquêtes
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Femme sur écoute
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