Chris5867- 18/05/2022

L'Afrique comme un cauchemar

« Congo Requiem » prend la suite immédiate de « Lontano » et vu la complexité de l’intrigue de l’ « Homme-clou », je conseille de ne pas laisser trop de temps entre les deux tomes, sous peine de ramer un peu comme je l’ai fait tout au long de la lecture de ce deuxième (et dernier ?) tome. On croyait l’affaire du copycat de l’« Homme-clou » résolue à la fin de « Lontano » mais… non ! La première partie se déroule en grande partie dans la jungle congolaise où Erwan cherche, au péril de sa vie, à refaire l’enquête de son père au début des années 70, l’enquête qui avait vu Morvan-père arrêter Pharabot suite à une série de meurtres rituels particulièrement cruels. En plein milieu des guerres tribales, Erwan va découvrir que son père est loin de lui avoir tout dit. Pendant ce temps là, à Paris, Gaëlle enquête sur son psychiatre et Loïc, en plein sevrage, doit faire face à l’assassinat de son beau-père. Toute cette première moitié, et notamment les chapitres en Afrique, sont assez pénibles à lire, non pas que le style Grangé soit désagréable ni que l’enquête soit trop compliquée (encore que…) mais la surenchère, pour ne pas dire la complaisance de Grangé quand il décrit par le menu les guerres tribales, les massacres, les exécutions sommaires, les rituels sanguinaires des enfants-soldats finissent par donner une impression désagréable. J’avais déjà eu cette impression avec certains passages du « Passager » (pourtant excellent) où Grangé cherchait visiblement l’écœurement au-delà de tout le reste. Si l’on ajoute à cela le racisme décomplexé de Grégoire Morvan on finit par se dire que Grangé joue un jeu curieux, limite malsain. Entre édulcorer la réalité et verser dans la surenchère, il doit y avoir un juste milieu que Grangé a eu bien du mal à trouver. Au milieu du livre, suite à la mort d’un protagoniste, le polar revient sur les rails et on revient à un roman policier noir, tortueux, plein de rebondissement et de fausses pistes mais somme toute classique. Là, je suis en terrain connu et je suis plus à l’aise, et je veux bien fermer les yeux sur quelques énormités (Grangé est parfois no-limit à la fin de ses romans !), je veux bien me laisser mener par le bout du nez jusque dans les toutes dernières pages, je veux bien assumer le bain de sang des derniers chapitres pour suivre cette enquête à tiroir qui amènera Erwan Morvan à croire à plusieurs reprises qu’il touche au but alors que… non. La psychologie des Morvan, pas toujours évidente à comprendre (il faut dire qu’avec une hérédité pareille ce n’était pas gagné !) est intelligemment exploitée, et l’on finit le roman en ayant tout pigé alors que là non plus, ce n’était pas gagné ! Le duo « Lontano-Congo Requiem » n’est pas ce que Grangé à pu produire de meilleur à mes yeux, mais pas non plus ce qu’il a fait de pire. A réserver aux amateurs de polars très noirs et à déconseiller aux âmes sensibles.