325 000 (anciens) francs, c’est la somme que doit réunir le jeune Bernard Busard pour s’offrir un snack bar en marge de la Nationale 7, échapper à l’usine de plastique Bionnas ou toute la petite ville travaille à la chaine, mais surtout pour l’exigeante Marie-Jeanne consente à l’épouser. Opiniâtre, il s’associe à un paysan du coin pour travailler à l’usine par roulement 24h sur 24, jusqu’à obtention de la somme désirée. Entre les gestes répétitifs de l’usine qui finissent par l’abrutir, et les minauderies de Marie-Jeanne, Busard aurait toutes les raisons de laisser tomber. Mais il se teint obstinément à son plan : les 325 000 francs comme unique objectif.
Petit roman de Roger Vailland, publié en 1955, « 325 000 francs » accuse un peu le poids des ans. L’intrigue est toute simple : un jeune homme veut conquérir le cœur d’une jeune fille qui le fait mariner, une jeune fille qui veut « s’élever » et ne surtout pas ni travailler à l’usine, ni épouser un ouvrier de l’usine. Pour se faire, il décide de fabriquer des pièces en plastique par des gestes mécaniques, en association avec un autre type, pour obtenir la fameuse somme et ouvrir un snack bar. Le roman brasse pas mal de thèmes comme la mécanisation de l’industrie qui déshumanise le travail, l’abrutissement de travail à la chaine, le paternalisme des petits patrons. Mais comme je l’ai dit, il est d’un autre temps, celui de la plasturgie dans les usines de l’Ain, du taylorisme mais pas seulement : dans la France de 1955, les rapports hommes/femmes sont différents, la France est encore (plus pour longtemps) une puissance coloniale et les passages sur l’Afrique paraissent aujourd’hui très datés. Et puis on ne parle pas en « francs » mais en « anciens francs », ce ne risque pas de parler à tous les lecteurs ! La narration est extérieure, toute l’histoire est racontée par un ami de Busard, mal identifié d’ailleurs. Le roman s’ouvre sur une course cycliste amateur assez épique, et là pour le coup ça n’a pas trop vieilli, c’est même assez bien raconté (quoi qu’un peu longuement) et assez bien vu d’un point de vue « sportif ». Si le personnage de Busard est assez sympathique, celui du Bressan aussi, celui de Marie-Jeanne n’est un peu moins. Faut-il y voir une petite pointe de misogynie ? Elle minaude, dit « oui », puis « non », puis rechange d’avis, réclame ceci, exige cela, elle est présentée en fin de compte comme ne méritant pas tous les efforts faits pour elle. La fin est cruelle et ironique, on la voir venir à quelques pages de la fin lorsqu’une nouvelle machine arrive dans l’usine de plasturgie. « 325 000 francs » est un roman qui se lit vite mais qui ne va pas passionner tout le monde, un peu trop daté probablement, y compris dans son aspect « lutte des classes ». Petite incongruité de cette vieille édition de poche que l’on m’a prêté : il n’y a pas de chapitre 6 et trois chapitres 8 !
Le poids des ans.
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325.000 francs
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