Emma Becker, la narratrice, rencontre Antonin. Ils tombent amoureux mais elle est mariée et a deux enfants et lui est en couple depuis cinq ans.
Quoi de plus banal ? me direz- vous, sauf à écrire comme Emma Becker à la première personne. Elle écrit sur l’amour en même temps qu’elle le vit : “Je suis en train d’en faire un livre. Je voudrais décrire les étapes de cet empoisonnement, parce que c’est exactement le nom que ça porte. La passion, c’est un empoisonnement du cerveau.”
Emma parle de l'écrivaine et du processus d’écriture, celle-ci lui servant à chercher à garder le contrôle d’une passion qui est sans contrôle : “Cette nuit-là, j’écris parce que ma vie m’échappe complètement, et que le seul contrôle que je puisse exercer dessus, c’est de la décrire.”
Le mal joli est une métaphore, ce mot d'obstétricien décrit les souffrances terribles de l'accouchement qu’on oublie aussitôt l’enfant posé sur son ventre, comme on oublie, dès que l’on est en présence de l'amant, les souffrances et les renoncements éprouvés lors de l’attente, au point de recommencer toujours.
Cette anatomie de la passion amoureuse, décrite jusque dans les anfractuosités intimes, combinée à la tyrannie d’être une mère peut choquer !
Cette autofiction déclenchera l’aversion ou l'attraction selon le lecteur de ce récit. Vous aurez compris où me ranger en fonction de ma note, car, en littérature, je cherche le truc en plus dans ma lecture et je dirai qu’ici, j’ai mon content de “feuilles de rose” !
On saisit qu’Emma veut être vraie. Elle n’a pas, paradoxalement, la prétention d’être une femme libre, même si elle décrit l’intime de l’intime de la plus fidèle des façons.
Elle nous restitue les mécanismes d’une passion qui s’installe dans la tête d’une femme écartelée entre la maîtresse et la mère “entre le confort ressenti avec l’amant et la débâcle qui patiente à la maison, prête à vous engloutir dès la porte d’entrée passée.”
La narratrice n’a pas une haute estime d’elle-même, mais ne se cache pas : “J’aurai passé ma vie à m'appeler écrivaine juste pour avoir une excuse qui me permette de parler de mon coeur qui me fait toujours mal, de moi qui d’une façon ou d’une autre me débrouille toujours comme un manche.”
Elle écrit comme elle vit sa passion, avec des mots puissants qui cherchent à rendre sans complaisance les moments les plus dangereux, les plus intenses et les plus beaux de sa vie. L’échange épistolaire entre deux écrivains est aussi pétillant.
Conforme à sa réputation, elle, qui s’est prostituée à Berlin et le raconte dans “La maison”, se livre à cru comme une femme qui sait éveiller en l’homme ce qui la rend femme sans retenue.
Un roman qui risque de cliver
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