Mertesger- 20/10/2024

Dense et verbeux

On retrouve Leto II dans un rôle qu’il a choisi afin de sauver l’humanité dans sa globalité. Les personnages des tomes précédents ne sont que des souvenirs, des voix du passé qui servent à manipuler celleux qui portent encore leurs souvenirs en elleux, bien que certains d’entre elleux ne soient que mentionnés. Dune n’est plus Dune ou plutôt, de l’antique désert, il ne reste que le territoire appartenant à l’Empereur-Dieu, son Sareer, sa Citadelle. Leto II, qui, afin de protéger l’Univers des maux et des violences systémiques et fondamentalement humaines, va devenir le Dieu de ce dernier, le Tyran qui ordonne et qui détruit. C’est un tome nettement plus dense et verbeux que les trois précédents, bien que le tome trois ait cette approche de la rhétorique très présente, surtout sur les discours religieux. Il prend place des millénaires après le tome 3, et si on suit Leto, on ignore tout de Ghani, hormis qu’elle a eut des enfants. La reproduction faisant encore partie des grands thèmes de ce tome, avec la guerre, la violence, la religion, l’attribution d’un statut de divinité à un être, la réflexion, l’indépendance, les traditions et la disparition de ses dernières (notamment représentées par les Fremen de musées), le sexe (ce dernier, il revient à tous les chapitres d’ailleurs, le Duncan ne s’est pas vraiment sorti les doigts du cul, mais passons). Je ressors donc mitigée de cette lecture. Leto II est fidèle dans son rôle de despote, car peu d’élu savent pourquoi il a choisi de faire ce choix et de quoi retourne son Sentier d’Or. Omniscient, il sait, voit, entend et perçoit tout autour de lui et son grand âge - plus de 3 000 ans, mine de rien - ainsi que sa transformation en Ver qui s’approche, l’ennuie. Il n’attend qu’à être surpris. Quand cela arrive, j’ai plutôt l’impression de suivre un enfant faisant un caprice (parfois mortel et destructeur). Si je ne suis pas spécialement étonnée de la fin, j’aurai apprécié l’être, à l’image de Leto. L’Omniscience et l’omniprésence de Leto étouffe tout et tout le monde, pourtant, sa solitude touche un peu, de même que celle de Moneo (on peut dire qu’il s’agit un peu de mon personnage préféré dans cette histoire). Il représente la loyauté des Astréides, la loyauté et la servitude aussi, et c’est ce que semble lui reprocher de temps en temps l’Empereur, tandis qu’il le félicite quand il prend des initiatives (aussi rares soient-elles). Quant au style d’écriture, il reste plaisant dans sa globalité, bien que pompeux par moment. Peut-être est-ce là un choix réfléchis de l’auteur et de la traduction. Cependant, il y a de nombreuses longueurs et heureusement que l’on partage différents points de vue. Celui de Leto est long, parfois pas entièrement compréhensible. Celui du Duncan est empli de colère refoulée (jusqu’à ce qu’elle explose), de confusion (comment un être du passé peut-il trouver sa place dans un univers où il ne connaît rien ni personne et que son existence est uniquement le fruit du clonage, alors qu’il y a eu de nombreux Duncan Idaho avant lui ?). Il veut s’accrocher à Léto, un de ces Atréides qu’il a servi et qu’il aime tant et pourtant, tout en lui s’éloigne de cette image qu’il a d’elleux. Siona, si elle est intéressante, je suis pas certaine d’avoir complètement compris ce personnage. Il m’avait semblé un retournement de situation à son sujet, pourtant, la fin n’indique pas cela. Ou je suis passée à côté, c’est aussi probable. Hwi, alors. Si j’avais souhaité lire un Roméo et Juliet, j’aurais pris Shakespeare. L’histoire entre Leto et cette dernière ne m’a pas touché, plutôt le contraire même. On comprend qu’elle a été créée afin de mener à la fin de l’Empereur-Dieu, il le sait, elle le sait, elle sait qu’il sait, il sait qu’elle sait qu’il sait, ils savent, nous savons, vous savez, bref. L’omniscience, t’as vu. Les Truitesses : les amazones de Leto, si on simplifie. Des guerrières, bien qu’on ne le voie pas très souvent à l’action. On sait qu’elles font régner la Paix de Leto selon ses dires. Moneo : il méritait mieux, mais j’ai beaucoup apprécié ces échanges avec Leto. Malky : sortie de nulle part, il disparaît tout aussi dans le néant. Pouf. La Guilde : ils sont là, parfois. Les Bene Gesserit : elles ne sont pas contentes de plus avoir leur drogue. Jessica me manque un peu quand même. Bref, si vous voulez avancer dans l’univers de Dune, c’est un tome important, surtout qu’on découvre des passages sur les tomes suivants et ce qu’il advient de cette planète, mais sachez que ça reste différent dans le ton (mais pas spécialement la forme). C’est une étape à passer, on aime ou on n'aime pas, j’en ressors plutôt mitigée, une sorte de meh (quelle brillante éloquence, on en conviendra).