« Les voies du Seigneurs » sont impénétrables, surtout lorsque vous comptez sur le prédicateur (laïc) Semon Dye pour vous y conduire ! Dans le très chrétien et conservateur Etat de Géorgie, à une époque où la ségrégation raciale bat encore son plein, Semon Dye arrive en voiture chez un fermier pauvre de la petite bourgade de Rocky Comfort. Fort de son statut autoproclamé de Prédicateur, il s’installe chez Clay Horey et prends ses aises, siphonne ses bouteilles, trousse sa jeune bonne noire, séduit l’ex-femme de Clay pour la prostituer, puis sa nouvelle (à peine 15 ans !), lui ravit sa voiture lors d’une partie de dés pipés, tout cela en a peine quelques jours. Clay est tiraillé entre la colère et la peur du Seigneur qu’incarne ce fumeux prédicateur. Le dimanche de prédication arrive enfin, et la séance va tourner à l’hystérie collective. A une exception près, tout le monde expie bruyamment ses péchés, mais cette exception plonge Semon Dye dans le désarroi, on pourrait presque croire qu’il était sincère ! Lecourt roman d’Erskine Caldwell n’est pas forcément très facile à lire et il faut un certain temps pour s’habituer à « l’exotisme » des personnages, au coté très « Clétus » des dialogues. Mais au bout de quelques chapitres, on est partagé entre incompréhension et fascination. L’autorité naturelle du prédicateur n’est finalement fondée que sur une seule chose : la religiosité quasi fanatique des « poor whites » de la « Bible Belt », il peut commettre successivement tous les péchés capitaux (à part le meurtre), tant qu’il a le mot « Seigneur » à la bouche, tout passe au culot. « Les voies du Seigneurs » est un roman qui dépeint à la fois une époque, ségrégationniste, et une géographie, celle du Sud profond où on est pauvre, mais où on trouve toujours à exploiter plus pauvre que soi, surtout s’il est noir ! La scène finale de prédication, qui fait un peu penser à la scène finale d’hystérie collective du « Parfum » de Süskind, suggère que Semon Dye était finalement presque sincère dans sa Foi, ce qui ne manque pas de laisser songeur… Pas de doute, « Les Voies du Seigneurs », est une sorte d’expérience de l’extrême !
Peinture au vitriol
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