La prison ruinée

La prison ruinée « Mon frère, ma soeur, cousine, ma gueule, mon poto... » Où se trouve-t-on au juste ?, se demande le lecteur dès les premières lignes de ce texte jailli, magnifique, sinon dans la littérature d'une jeune frangine de Genet, lequel aurait eu cent ans le 19 décembre 2010. En vérité, nous sommes à Fleury-Mérogis, le plus grand centre pénitentiaire européen, dans la banlieue sud de Paris, et une femme, détenue, nous parle d'une société inversée où les vraies valeurs - d'amour, de solidarité, de jouissance, de confiance, de joie - se trouveraient et se réaliseraient de l'autre côté des barreaux, en prison. La prison, oui, comme révélateur de l'essentiel humain, un monde ritualisé de l'échange sans argent, où les travailleuses ne sont plus dépossédées de leur force productive, où le corps et le désir brûlent de nouveau. Où le dimanche, à la messe, « des ferventes à la beauté noire, allumée » libèrent Dieu pour le rendre à sa vérité insurrectionnelle. Sylvie Crossman « [...]. Le bien était fait, je veux dire la prison ruinée. » Jean Genet, Un Captif amoureux, 1986.